Reru: Jeux de Ficelle des Indiens brésiliens Karajás
Chang Whan,
Niterói, RJ, Brésil
L'article présent rapporte les résultats de la
recherche conduite par l'auteur, sur l'activité
consistant à réaliser des jeux de ficelle, observée
parmi les Indiens Karajás au Brésil entre les
années 1996 et 1998, dans le cadre des matières
obligatoires nécessaires pour un M. A. degree
en Anthropologie, de l'Art à Université Fédérale
de Rio de Janeiro. En tout 50 jeux de ficelle ont
été photographiés. Des méthodes pour réaliser
28 d'entre eux sont présentées dans cet article.
Introduction
Le peuple Karajá
Le peuple Karajá est un peuple indigène brésilien
qui a traditionnellement habité la région centre-
ouest du Brésil, essentiellement dans et autour le
bassin fluvial de l'Araguai, qui coule à travers les
états de Goiás, Tocantins et Mato Grosso.
Avec la population présente d'approximativement
2700 personnes vivant dans près de vingt villages,
le peuple Karajá s'est efforcé de protéger son
identité ethnique, gardant son langage, ses
pratiques culturelles, et ses croyances
religieuses vivantes et effectives, en dépit de leur
histoire de plus d'un siècle de contact avec la
société brésilienne des environs.
Les villages de Santa Isabel do Morro et Fontouna
sont à présent les plus grandes communautés
Karajá, avec respectivement à peu près 400 et
300 personnes. Dans ces villages, les traditions
culturelles Karajás, qui sont étroitement apparentées
au croyances religieuses et aux cycles rituels annuels,
ont été le plus préservées avec succès. Pour le
peuple Karajá, la rivière Araguaia est sa plus
important référence à la vie. Le Bero Hokã ('la
rivière importante'), comme il l'appelle, est vue
comme à la fois source de vie et de subsistance, et
une évidence incontestable du monde surnaturel.
Profondément dans les eaux du Bero Hokã sont
les êtres primordiaux des Karajás, ainsi qu'une
entière légion d'entités surnaturelles vénérés par
eux dans leurs cycles rituels annuels. La rivière
est, par conséquent, une image qui intègre les
domaines sacré et séculaire, et la vie sociale et
rituelle des Karajás, est formée d'après la
cosmologie Karajá. Leurs cycles rituels -
comme les rites initiatiques d'Heto Hokã, le
'Festival de la Grande Maison' - suivent le cycle
des saisons humides et sèches, qui provoque
la montée et la baisse du niveau de l'eau sur les
rives du Bero Hokã.
Connu pour leur bel artisanat, le peuple Karajá
est le créateur d'une masse diversifiée d'objets
culturels, dans différents supports, qui sont
généralement fortement apparentés à sa vie
culturelle riche et intense. Beaucoup de chercheurs
pionniers ont été attirés par la richesse et la beauté
de la production d'art culturel, y compris Paul
Ehrenreich à la fin du dix-neuvième siècle (1888),
castro Faria (1959), et Maria Heloisa Fénelon
Costa (1978).
Reru et temps libre
Parmi les ornements de corps et les masques rituels
élaborés, les instruments rituels, un large variété
de travaux en vannerie et en poterie, de travaux
avec des plumes, d'ustensiles de cuisine, et d'outils
de chasse, nous pouvons aussi identifier une
catégorie spéciale d'objets - les jeux et les
accessoires de jeu. Cet essai se consacre sur un
set particulier d'objets dans ce groupe d'objets;
appelés reru, signifiant simplement 'ficelle' dans
la langue Karajá. La réalisation du jeu de ficelle
semble être l'activité récréative la plus appréciée
parmi les plus jeunes, les enfants, et les adultes
aussi. Les personnes plus âgées apprécient aussi
la démonstration de constructions différentes,
inconnues des enfants.
Au moment du jeu, les jeux de ficelle expose une
succession de formes de ficelle complexes, belles
et variées, mais lorsqu'ils ne sont pas exposés, ils
sont juste des ficelles en boucle quelconques,
informes, d'à peu près un mètre et demi de long,
fait de la fibre du palmier Aguaje.
La nature fugace et évanescente des jeux de
ficelle est évidemment due au caractère de leur
support naturel - les mains humaines, sont
nécessaires aussi à beaucoup d'autres tâches
dans la vie. En outre, après qu'ils sont réalisés
et montrés, les jeux de ficelle simplement
disparaissent. Ils sont tangibles, mais ont une
existence courte et fugace. Pour ces
caractéristiques spéciales, les jeux de ficelle
peuvent être vus comme des installations
portables instantanées. Ils sont réalisés pour
deux réalisations principales: la jouissance
esthétique de ses multiples formes, et
l'amusement ludique de l'activité. Pour ces
raisons précises ils doivent être étudiés et
gardés pour encourager et assurer leur
préservation. Oui, dans les villages que j'ai
visités, les jeux de ficelle semblaient toujours en
danger d'extinction, étant donné
l'augmentation d'activités et de nouveaux
loisirs compétitifs, qui sont constamment
importés et assimilés à la vie du village, comme
la télévision, les jouets industrialisés, les jeux
électroniques, etc. Dans le travail de terrain,
je n'ai pas observé d'activité de réalisation de
jeux de ficelle se produire fréquemment et
spontanément dans les villages, si elle n'était
pas provoquée.
La fibre de l'Aguaje est largement employée
pour l'artisanat de beaucoup d'articles culturels,
comme les masques et les tenues rituelles, toute
sorte d'ornement de corps et de vannerie, aussi
bien que pour la réalisation de cordes et de
ficelles de toutes sortes d'épaisseur, pour de
nombreux buts.
Etant continuellement ramassé et préparé, ce
matériau brut abondant est un terrain de
constante invitation pour des envies 'ludiques',
enjouées - de la sorte qui déclenchent l'activité de
la réalisation des jeux de ficelle. Une fois
commencé, le dynamisme ludique puissant
semble avoir une vie à lui. Dans la réalisation
des jeux de jeux de ficelle, on peut facilement
sentir que sa nature expérimental aléatoire
est fomentée par la recherche de formations
plaisantes esthétiquement générées dans ce 'jeu',
qui est souvent appelé dans différents langages
- "jeu", "juego", "jogo", "brincadeira".
Le temps du jeu ou le temps du loisir, est sans
aucun doute le temps le plus libre qu'un membre
individuel d'une communauté socialement organisée,
peut apprécier, et un engagement dans n'importe
quelle activité pendant ce temps devrait être
en règle générale optionnelle. Victor Turner parle
du temps liminal, l'anti-structure sociale (1977),
pour faire référence ou définir cet sorte de temps
social, lorsque des individus ne sont pas engagés
dans une activité productive socialement. En
d'autres mots, si quelqu'un décide de ne pas jouer
et de se reposer, ou même de travailler son temps
libre "anti-structure", il ne devrait pas y avoir
de problème du tout, autrement il ne serait pas
caractérisé en temps que temps libre ou de loisirs.
Donc, tout peut se passer, y compris travail avec
pauses, et étude dans les pauses. On peut disposer
de son temps libre comme on le désire. C'est un
espace de temps liminal car il est libre - il est
plein de possibilités, potentiellement imprévisibles.
C'est la sorte de terrains dans lesquels la réalisation
du jeu de ficelle émerge - les terrains liminaux
sont propice au flot ludique de l'expérimentation
de formes plaisantes esthétiquement, qui sont
continuellement et à profusion générées. Cette
conduite exploration ludique agréable est
certainement la raison pour laquelle les jeux de
ficelle sont généralement si nombreux, où qu'ils
émergent. Une autre caractéristique remarquable
des jeux de ficelle est le fait, qu'en général, ils ne
résultent pas de planification préalable. Les formes
sont généralement d'abord obtenues à travers une
exploration ludique, et seulement alors leurs créateurs
essaient de trouver une association référentielle de
forme pour les nommer. Quelqu'un de pourrait pas
être capable de dire, par exemple, ""voyons voir
maintenant, je vais essayer de faire une sauterelle",
et alors travailler avec sa ficelle en boucle, et réaliser
une forme ressemblant à une sauterelle, à moins que,
si cela arrivait ce serait une coïncidence absolue.
Dans la plupart du temps, les formes du jeu de ficelle
résultent d'une exploration totalement ludique,
avec de simples ficelles en boucle. Ce sont des
résultats exaptationistes plutôt que des résultats
d'adaptation planifiée. Stephen Jay Gould (1991),
un paléontologue de l'Université d'Harward qui
travaillait sur la théorie évolutionniste et son
histoire, a développé le concept de l'exaptation
comme un complément à l'idée dominante
d'adaptation pour expliquer beaucoup de cas
de phénomène non-adaptif, qui ont été observés,
dans à la fois l'histoire naturelle et culturelle.
Il soutient que dans une évolution biologique,
ainsi que dans une évolution culturelle,
l'exaptation conduit à de nombreuses adaptations.
Là où l'accent de l'adaptation est sur l'emploi,
l'accent de l'exaptation est sur les répercussions.
En d'autres mots, c'est le résultat qui importe, pas
le but. Gould fait remarquer qu'un exemple
classique d'exaptation, ce sont les éléments
architecturaux qu'on trouve habituellement
dans les églises et qu'on nomme "trompes",
qui sont les espaces laissés entre les éléments
structuraux d'un bâtiment, comme "l'espace
triangulaire entre la courbe extérieure d'une
arche et les murs droits et le plafond qui relient
l'arche." Les trompes ne sont pas une adaptation,
ce qui veut dire qu'elles existent, pas car elles ont
été planifiées, mais car elles sont les répercussions
de la constructions d'arches. Néanmoins, elles sont
souvent si merveilleusement ornementées et
intégrées au motif architectural dans son entier,
qu'on pourrait facilement penser qu'on les a faites
pour cela, alors qu'elles sont en fait juste un emploi
coopté de quelque chose, qui est apparu dans le
processus de quelque chose d'autre. Comme les
trompes, nos jeux de ficelle viennent au monde
par un processus similaire. Ils sont des exaptations
qui n'ont pas de buts utilitaires prémédités, mais
jaillissent d'explorations folâtres. En fait, la ficelle
elle-même, la ficelle employée pour réaliser des jeux
de ficelle vient certainement de quelque chose de
laissé d'autres projets. Les jeux de ficelle sont
des objets culturels "anti-structurels" qui s'infiltrent
dans le temps et l'espace "anti-structurels".
SUITE
Le répertoire du jeu de ficelle Karajá
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